Des
réincarnations en tortues-alligators qui se passent mal. Les déchets
mâchés. La chair des autres n’est que de la barbe à papa. Dans
l’après-midi d’un après-guerre, le paria va d’un orgue de
Barbarie à un autre. À chaque fois on veut voir Miss Univers se
déshabiller, l’araignée-scorpion de son sexe. La femme à barbe
pousse son propre cœur dans le landau. À quoi bon revenir à la
chair de la véranda si l’on ne peut pas dire j’ai vu la fin d’un
monde arraché à la chair ? Ce n’est l’anniversaire que de
celui qu’on va immoler, qui s’avancera donc ? Miss Univers
mange la barbe à papa piétinée. Résignations traversées. Le
vent me pousse à transformer un sentiment d’abandon en landau pour
poupon difforme. Je me rappelle j’étais dans mon corps comme
au début d’un ciel athée où tout était facile. Même le soleil
est dans l’ombre, celle d’une autre pensée. La monstruosité, on
ne peut jamais en être content. Avec nos panamas brûlés et nos
landaus sans roues on arrive au présent aux plus beaux Orgues de
Barbarie. Même l’herbe-aux-femmes-battues vient se refaire une
beauté sur les ruines du palace Paradis. Vent mort dans les
vérandas. Tout au bout d’être des fous bariolés les cartes du
tarot ne savent pas nous expliquer notre laideur.
Les signes
par terre sont déjà des signes qui ont l’air écrasés. Mur
derrière le soleil barbare. Miss Univers le voit dans sa tasse de
thé qu’elle a le tétanos. Je vais jouer de l’Orgue de Barbarie
ailleurs, plus près des Orgues de Barbarie cassés des salles
lépreuses. La barbe à papa me dit de ne pas penser à trop
d’araignées-scorpions en même temps et de laisser la musique
lépreuse me dévorer le corps. Soleil taré. À quoi bon articuler,
chacun est occupé à enterrer ses propres ossements ? Le
parabellum troue la lumière pour voir la femme à barbe se
déshabiller. Je retrouve plusieurs années après des
araignées-scorpions dans ma barbe battue et traînée dans les
ruelles. Un sang imaginaire coule dans le canal irriguant des
orchestres mécaniques. De l’autre côté du pont en fer toutes les
femmes à barbe encore vivantes cherchent de la barbe à papa
acharnée. Corps à corps d’un esprit contradictoire. La carne des
réincarnations, les miséricordes pilées, des charniers de barbarie
accrochée à des pieux. De la véranda je tire sur les
tortues-alligators de la véranda. La Pensée est le seul palais.
N’allez plus leur faire du vent aux esprits du charnier, n’allez
plus leur jeter vos chansons.
Par les canaux du paradis la saleté
arrive à la maladie de qui veut être diseur de bonne aventure. En
temps d’atterrement le seul soleil est celui d’une carte de tarot
cornée. Je vais aller poser tout au bout de ma folie une tasse de
thé que je ne boirai jamais. La chair de l’anniversaire pourrit
sous les cloches en verre du festin futur. Des femmes à barbe se
perdent à traverser le jour. Tortues-alligators à rentrer au
charnier et l’herbe-aux-femmes-battues à la folie. Jour charnier,
cloches en verre divines mais sales, robes de barbarie laissées sur
les déesses dans la barbe à papa. Je montre à Miss Univers mes
verrues, elle n’a pas voulu venir à mon anniversaire. Ce que je
suis grouille ; le paradis brûle derrière de plus grands
asiles. Bougies oubliées déifications ratées
tortues-alligators mangées sur le mot paradis. Chiffonné comme du
papier-cadeau mon esprit s’énerve au mur qui le retient. L’amnésie
ne fait pas autant de kilomètres pour laisser le soleil à d’autres.
Mon imagination pour passer se transforme parfois en
araignée-scorpion. Le côté imaginé du monde, pas retenu, par des
pilotis, pas cautérisé. Une bougie qui ne bouge plus a le droit de
douter de moi. On ne peut plus remonter les versants du charnier.
[...]
Paru dans Niveau 8,
recueil collectif, Ed La Poussière Dit, Octobre 2012
Prix de vente : 13 €
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